TECHNIQUES DE MANIPULATION MENTALE
Les projets d’attentats de Londres et de Glasgow ont constitué la matière brute de cet article consacré aux techniques de manipulation mentale des hommes dans nos sociétés actuelles. Le tintamarre médiatico-policier qui a suivi ces événements est un cas d’espèce qui devrait faire réfléchir tous ceux qui s’intéressent à la vie publique, futurs journalistes, sociologues des sciences et des médias, politologues, hommes politiques, décideurs économiques et tout naturellement les services du renseignement militaire et économique.
CARACTERES SPECIFIQUES DU SYSTEME NERVEUX
L’école physiologue russe animée par Ivan Pavlov au début du XXe siècle montre d’une façon scientifique, à partir des expériences sur un chien que le système nerveux est le siège de deux processus antagonistes : la faculté d’être excité et la faculté d’inhiber l’excitation. L’excitation et l’inhibition sont produites par l’irradiation et la concentration dans les hémisphères cérébraux. L’excitation d’un point donné dans les sphères cérébraux s’étend à l’instar des ondes électromagnétiques avec une très grande vitesse sur un vaste rayon. L’irradiation de l’excitation à travers le système de neurones corticaux s’observe dans la psychologie des réflexes conditionnés. L’ablation des hémisphères entraîne la disparition totale des réflexes conditionnés. Si l’écorce cérébrale a la faculté de former de nouveaux réflexes, elle peut être aussi affaiblie par l’irradiation de l’inhibition sur toute la surface corticale, entraînant un état de somnolence. Un excitant thermique dont l’action se prolonge amène le sommeil et une généralisation de l’inhibition interne peut provoquer un ébranlement du système nerveux au moyen d’une excitation trop forte. À ce moment-là, un individu frappé par une parole impérative, un ordre, cet ordre devient irrésistible. Selon Pavlov, la parole, parlée ou écrite, est un excitant conditionnant, formant un réflexe comme n’importe quel excitant. Un réflexe peut se former en partant de l’impression sensorielle d’un objet, comme signal conditionnant et suscitant l’intérêt de le saisir mentalement. Ensuite, sur ce réflexe se greffe un nouveau réflexe formé à partir d’un réflexe précédent(image) et d’un signal conditionnant, la parole-prononcée(excitationsauditives) ou écrite (excitations visuelles). Cette parole devient à son tour un excitant déclenchant le réflexe d’origine(représentation de l’objet par l’image). Ainsi des liaisons complexes s’établissent-elles entre les excitations optiques et acoustiques, qu’on produit graphiquement ou vocalement, et des objets et des phénomènes du monde extérieur. Les premiers deviennent des signaux pour les derniers et peuvent les remplacer dans les réactions conditionnées.
L’ATTENTION, BASE PHYSIOLOGIQUE DE LA CONSCIENCE
Les réflexes conditionnés revêtent une importance capitale car ils sont à la base de toute propagande politique qui a partie liée avec le phénomène du sommeil, de l’hypnose et de la suggestionnalibilité. Car la suggestion intervient suite à la parole et à l’émission de l’ordre qui viennent frapper un mécanisme psychique qui se trouve dans un état d’affaiblissement physiologique. L’ignorance est le meilleur milieu pour former des masses se prêtant facilement à la suggestion, laquelle suggestion fait perdre à l’être humain sa conscience, car le degré de conscience de l’homme est en fonction inverse de sa suggestibilité. Pour que la conscience joue, il faut qu’il y ait réaction émotive d’intérêt et une attention sur les actes que nous accomplissions pendant que nous en ayons conscience. L’attention est un processus unifié consistant à sélectionner certains actes, à orienter notre conduite dans un sens et pas dans un autre et à canaliser nos activités dans une certaine direction et pas dans une autre. L’attention est produite par l’excitation à un degré optimal d’une région donnée des hémisphères tandis que les autres régions se trouvent dans un état de veille où l’excitabilité est au minimum. Plus le champ de l’excitation de cette région est grand, plus le champ de notre conscience se rétrécit et plus notre cerveau est inhibé par tout ce qui n’est pas sujet de notre attention. L’intensité de l’attention dépend d’une part des caractères des excitants sonores et visuels et surtout de leur intérêt affectif et d’autre part de l’état du cerveau où la fatigue empêche la concentration.
Il y a deux formes d’attention : l’attention spontanée, automatique, un réflexe provoqué par un stimulus immédiat et une attention dirigée et volontaire qui tient en haleine celui qui est fixé sur une idée et concentré sur un objet. Les hommes perçoivent plus ce qu’ils attendent de percevoir que ce qu’ils veulent percevoir. L’attente a plusieurs sources, l’expérience passée, la formation professionnelle, les normes organisationnelles et culturelles. L’esprit humain n’ayant pas la possibilité de stocker d’énormes quantités d’informations, la perception des hommes se forme à partir d’une infime quantité d’informations qu’ils reçoivent du monde extérieur. La réception des informations en très petites quantités étalées dans le temps facilite l’assimilation de l’information. Seule la distillation par bribes de ce qu’il est convenu de transmettre permet l’efficacité du message. Mais une fois stockées dans le cerveau, les informations ne doivent plus changer et elles ne doivent plus être modifiées. Les stratèges de la propagande politique doivent s’efforcer autant que possible de limiter l’impact les informations adverses et de s’efforcer de maintenir leurs propres informations intactes le plus longtemps possible. Le fait de changer ce qui a été transmis et répété plusieurs fois(plusieurs dizaines voire centaines de fois) a pour effet d’entraver la technique du dressage aussi bien des hommes que des animaux. Une école, comme l’école du cirque, est le lieu de formation des réflexes conditionnés, car la règle générale dans le processus du dressage consiste dans l’association du facteur conditionnant le signal sonore ou acoustique(les mots et les sons du langage pour les êtres humains) et le facteur constitué par un mécanisme inné de peur ou d’appétit. Pour respecter le principe du synchronisme entre le signal et le geste attendu de l’individu ou de l’animal dressé, il ne faudrait rien changer ni aux couleurs, ni aux dispositions des objets. Un autre acteur déterminant favorisant la formation des habitudes et leur automatisme, ce sont le rythme des excitations et les perceptions rythmiques comme la musique. Le cirque use beaucoup de la musique et le roulement de tambours favorise l’exécution du « Pas de l’oie ».
NATURE ET FONCTIONNEMENT DE LA MEMOIRE
Physiologiquement, le cerveau est composé de 10 milliards de neurones capables de stocker des informations. La mémoire fonctionne grâce à des opérations par impulsions électriques entre des neurones. La mémoire est formée de trois éléments : lieu de stockage de l’information, la mémoire du court terme ou short-term memory(STM) et la mémoire du long terme, long-term memory(LTM). Chacun de ces éléments diffère des autres par sa fonction, la forme de l’information retenue et la durée de sa rétention. Le stockage de l’information sensorielle est un processus physiologique où les images des objets sont retenues dans la mémoire pendant un quart de seconde. Ce processus fournit la matière première au cerveau. Le deuxième processus appelé la mémoire courte ou STM reçoit les premières informations pendant quelques secondes ou quelques minutes. Comme la mémoire sensorielle, la mémoire courte retient l’information pendant une courte période. la mémoire courte ne peut pas stocker beaucoup d’information. Par exemple, sur 10 ou 20 noms ou nombres, seules cinq ou six unités sont retenues et généralement celles de la fin. Pour maintenir une information dans la mémoire courte, il faut qu’elle soit soumise à un processus de répétition, appelé « processus of rehearsal », consistant à la répéter et encore la répéter. Pendant la répétition, les gens n’ajouteront pas de nouvelles informations et la somme d’informations retenues dans la mémoire courte est limitée mais une fois retenue, il sera difficile de la changer. Quant à la mémoire longue, ou Long-Term Memory(LTM), la réparation des informations est longue et difficile. Pour restituer les informations stockées dans la mémoire, il convient de restituer le contexte dans lequel elles ont été formées. C’est là que l’on commence à se rappeler, noms, places et événements qui semblaient être oubliés. Une fois les hommes ont commencé à penser à un problème, les circuits mentaux peuvent les réactiver et les renforcer et ce processus facilitera la restitution de l’information, laquelle restitution donnera lieu à la formation du schéma. Un schéma est un modèle de relations entre différentes données stockées dans la mémoire. Pour transmettre les informations de la mémoire courte à la mémoire longue, il est nécessaire de procéder au développement des associations entre la nouvelle information et les schémas déjà établis dans la mémoire.
FORMATION DE LA MACHINERIE PSYCHIQUE
L’école et les méthodes pédagogiques semblables à celles mises en oeuvre à l’école du cirque consistent à préparer les élèves à leurs activités futures dans la société. L’école américaine de psychologie a établi que les préjugés raciaux sont formés chez les enfants dès l’âge de cinq ans. L’excitation verbale dont les élèves font l’apprentissage à l’école est l’excitant conditionnel par excellence qui permet de greffer facilement les réflexes les uns sur les autres. L’imitation est un puissant facteur dans la formation des réflexes chez les enfants où elle joue le rôle de drainage. L’école est aussi le lieu de formation de réflexes dits retardés visant à inculquer aux enfants l’autocontrôle, la maîtrise de soi et la faculté d’attente pour créer le réflexe de se maîtriser dans la vie réelle.
À l’instar de l’éducation qui a pour but de former des réflexes conditionnés mais d’une manière durable, la publicité et la propagande emploient la technique des réflexes conditionnés pour créer, transformer et conditionner des opinions et des comportements. La publicité utilise des informations non pas pour former et convaincre l’homme de la rue et les groupes qu’elle cherche à atteindre par des arguments rationnels mais pour frapper et suggestionner. Elle mise sur l’obsession et cherche à créer le besoin chez celui auquel elle s’adresse. Ce sont les mêmes techniques du dressage dans l’école du cirque que la publicité utilise pour provoquer les réflexes conditionnés de ses destinataires, grâce à la suggestion et la répétition et sous forme d’affiches illustrées. Une compagnie d’assurance-vie cherchant à vendre ses produits joue sur le facteur de la peur et en termes très suggestifs qu’inspirent les dangers de la vie quotidienne et surtout les conséquences désastreuses pour la famille du sinistré.
LES SYMBOLES, LANGAGE DE L’INCONSCIENT
Le symbole peut jouer dans la formation des réflexes conditionnés le rôle de facteur conditionnant qui, se greffant sur un réflexe préexistant, peut à son tour devenir excitant déterminant telle ou telle réaction. En Politique, les symboles représentent des idées, des systèmes ou des doctrines souvent destinées à les rendre accessibles au plus grand nombre de personnes. La propagande politique utilise les symboles par l’image mais aussi les inscriptions, les devises, les pancartes, les défilés etc. Leur utilisation s’inspire de l’exemple de la publicité commerciale qui a pour but non pas tant de convaincre que de déchaîner, par des formules concises et frappantes, les passions des masses et de les mobiliser autour d’un objet ou d’une image. De nos jours, les symboles, pour s’extérioriser, utilisent comme véhicules la radio et la télévision devenues les deux principales techniques de la manipulation mentale. La propagande audio-visuelle à la scène et au cinéma exprime en général les mythes et les stéréotypes d’une société tout en contribuant à les renforcer encore davantage grâce à des acteurs populaires et à des films admirablement bien montés et réalisés. Le symbole est généralement conçu comme une représentation instantanément évocatrice d’une idée ou d’une doctrine ; il est le signe mécanique qui suggestionne les hommes, qui les rallie autour de cette même idée. La propagande politique a son service le journaliste et la presse pour provoquer à dessein des pulsions et des sublimations, pour inhiber des réflexes conditionnés, en désinhiber d’autres, pour en créer de nouveaux et déclencher des actions. Même les journaux soi-disant politiques qui prétendent fournir des informations objectives sur des événements sous forme d’articles et de commentaires font appel à l’émotivité du lecteur en traitant d’une façon tendancieuse l’information donnée, en employant certains mots et certaine terminologie forgés dans la sphère de la politique pour toucher certaines cordes sensibles de l’âme humaine. Par exemple, quand la classe politique traite de la question de l’immigration, la presse fait l’écho de ce thème sans le soumettre à la critique en montrant son instrumentalisation par les partis politiques qui en font leur fonds de commerce électoral et un thème de diversion mis au service d’une stratégie politique visant à flatter les bas-fonds des couches populaires nationales par opposition aux immigrés et à faire remonter ce qui est le plus primitif et ce qui est le plus sombre dans la psyché collective.
TECHNIQUES MODERNES DE MANIPULATION MENTALE OU LA PROPAGANDE TOTALE
Quand on parle d’information dans la presse audio-visuelle, cela donne l’impression que l’on a affaire à l’objectivité et la neutralité bienveillante du journaliste et de la presse. Or c’est là que réside l’erreur monumentale, car l’information est une condition objective de la propagande et de la manipulation mentale des opinions publiques. L’information est bien une technique, certes sournoise, de la manipulation mentale, car elle a pour but d’orienter d’abord l’attention de l’opinion publique vers des questions économiques, sociales et politiques existantes objectivement. Mais c’est la manière dont elle est traitée et analysée par les mass medias qui devient tendancieuse et partisane. Il y a certes un problème d’immigrés et d’immigration dans le cadre de la mondialisation économique, un problème de délinquance et de chômage. Il y a aussi un problème de terrorisme. Tous ces problèmes mis sur la place publique par les moyens d’information des masses sont réels, car, personne ne peut les nier et ils existent objectivement. Mais là où ces informations deviennent une condition de la propagande et de la manipulation mentale des hommes, c’est que ces informations font partie d’une stratégie d’ensemble, de ce qu’il convient d’appeler un plan de campagne. Depuis la Seconde Guerre mondiale et profitant des méthodes trop visibles et autoritaires des régimes nazi et fasciste, c’en est fini avec les anciennes méthodes de propagande fondées sur les principes de l’intimidation à rebours et de la menace. Les techniques modernes de manipulation mentale des masses sont tout autres et elles ont été élaborées à partir de recherches théoriques et d’expériences de laboratoires de recherche de la psychologie sociale. Heurter de plein fouet l’individu dans ses convictions profondes et dans ses sentiments les plus intimes, c’est une mauvaise tactique et qui est contreproductive à bien des égards. Les dernières techniques de la manipulation mentale sont plus douces et plus insidieuses, car elles utilisent le principe de la suggestion et l’appel aux mythes et aux stéréotypes d’une société. Avant de chercher à déclencher les grands mouvements de masses, soit pendant les élections soit pour préparer les opinions publiques à mener des guerres, soit pour faire avaliser des mesures autoritaires, soit pour faire voter des lois autoritaires et de régression sociale et démocratique, les stratèges commis à cette tâche, aidés par des instituts de sondage et d’opinion, mettent en œuvre un plan de campagne comportant les points suivants:
- Production d’études et de monographies sur les groupes d’individus constituant la cible de la propagande : classe d’âge, milieu socioprofessionnel, religion, etc.
- détermination des buts psychologiques à atteindre chez les individus de ces groupes;
- support matériel pour atteindre ces buts
- les organes professionnels spécialisés pour mener les différentes formes d’action
- mode d’organisation des actions dans l’espace et dans le temps
- coordination de ces actions
- contrôle du plan, le suivi de son exécution et les effets constatés ou escomptés.
Tant qu’il existait de nombreux journaux d’opinion, des agences de presse indépendantes, des organes de presse locaux, la manipulation mentale des masses et la propagande politique pouvaient ne pas prospérer car une propagande était susceptible d’être neutralisée par une contre-propagande qui consiste à repérer les thèmes de l’adversaire, les isoler, les classer par ordre d’importance puis les combattre isolément. Mais aujourd’hui, avec la concentration des mass medias entre les mains de quelques groupes financiers et industriels, c’est l’âge d’or de la propagande totale et de la manipulation mentale à l’échelle planétaire. Il n’existe plus en face de ces mass medias, un contrepoids médiatique capable de s’opposer et de mener une contre-propagande dans le grand public pour neutraliser la propagande adverse, attaquer ses points faibles et combattre ses opinions ou pour mettre la propagande de l’adversaire en contradiction avec les faits(notamment avec les thèmes de la délinquance, du terrorisme et de la délinquance). S’il est vrai que les techniques actuelles de manipulation mentale et de la propagande politique diffèrent sensiblement des techniques mises en œuvre par les régimes fascistes et nazis des années vingt et trente du XXe siècle, du fait qu’elles ne sont plus fondées sur les procédés de l’intimidation à rebours et de la menace mais sur le principe de la suggestion, les stratagèmes employés par les meneurs des foules d’hier et aujourd’hui sont les mêmes. Comme Hitler jadis, le meneur d’aujourd’hui emploie le stratagème suivant: il doit suggérer la peur, faire ensuite entrevoir l’issue de la situation dangereuse et proposer d’atteindre la sécurité par les actions qu’il suggère. Pour faire accepter par les masses, une idée ou une attitude, il faut faire référence aux mythes du passé et aux stéréotypes enfouis dans la psyché collective. Toute action efficace de manipulation mentale des foules doit être fondée sur un nombre restreint de mots, de formules tranchantes et concises, des formules qui doivent être enfoncées à grands coups dans le psychisme des masses mises d’avance en état d’impressionnabilité accrue. C’est le principe même de la création des réflexes conditionnés de Pavlov. Pour obvier au danger de la lassitude par répétition, il est à conseiller de varier les aspects des thèmes à l’instar de la publicité commerciale qui, tout en employant toujours l’image de l’objet ou de la personne, varie leur mise en scène ou procède au changement du casting. Une condition essentielle pour garantir une efficacité optimale de la manipulation mentale des masses est la simultanéité et l’uniformité des thèmes en plusieurs endroits d’où la nécessité d’une direction centralisée des actions stratégiques. Cette condition a été remplie aujourd’hui par la concentration des mass medias entre les mains de quelques groupes ou de quelques personnes. Il faut aussi de la permanence dans le temps des actions déjà mises en œuvre, car il est nécessaire de ne pas laisser aux hommes le loisir d’être sollicités ou atteints par les actions d’une propagande hostile ou par les sollicitations de groupes adverses. Hitler disait que la propagande ne doit ni s’arrêter ni chômer, elle doit émettre ses sirènes 24 heures sur 24 heures. Allumez votre radio ou votre poste de télévision à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, et vous retrouverez sans problème votre bulletin d’information et vos émissions habituelles souvent en direct souvent en différé. La règle d’or garantissant l’efficacité des techniques de manipulation mentale des masses, c’est de ne jamais laisser le temps de réfléchir à ceux auxquels elles sont destinées, car l’homme commencera à réfléchir dans la solitude et à ce moment là il redeviendra un être humain à part entière en prenant conscience de la vacuité de l’existence humaine, de ses conditions sociales et politiques humiliantes et de la nature perverse des systèmes politiques actuels.
La répétition joue donc un grand rôle dans la formation des réflexes conditionnés. Ce sont la même idée, les mêmes noms et les mêmes événements qui sont répétés une dizaine voire une centaine de fois dans la même journée. C’est la même image qui est reproduite en très grande quantité, placardée à des endroits différents, toujours pareille pendant une période plus ou moins prolongée. Comme la croix gammée, la marque de fabrique d’Hitler qui était le symbole omniprésent dans l’Allemagne d’avant-guerre, à toutes les occasions, sur tous les murs, sur les carrefours, les édifices publics et les rues, la propagande politique d’aujourd’hui utilise la même méthode de répétition où les affiches des candidats couvrent les murs des villes et des villages des mois avant les échéances électorales, accompagnées de leurs slogans et de leurs mots d’ordre. Pour faciliter leur assujettissement aux mots d’ordre et aux slogans des chefs, les électeurs sont soumis des mois durant voire des années, comme on a eu la preuve avec le matraquage médiatique en faveur de Sarkozy(dès 2005), à d’intenses excitations lumineuses et sonores et à des chants et des sonorités rythmées et obsédantes destinées à créer un état de fatigue généralisé.
Parmi les techniques modernes utilisées par les meneurs et par les services des renseignements, c’est l’appel à la morale et à la démagogie sociale. Une technique efficace de manipulation mentale doit être fondée sur l’âme du peuple, sur le sens commun, sur des idées simplistes et communes à la majorité des hommes vivant dans une société donnée. Par exemple, en matière de démagogie sociale, Hitler employa le mot socialisme à côté du nationalisme pour drainer les voix de l’électorat populaire à qui il avait promis l’augmentation de leurs salaires. En 2007, le candidat Sarkozy fait appel à Jean Jaurès et promet aux salariés l’augmentation de leur pouvoir d’achat selon la formule désormais connue « travailler plus, gagner plus ».
Pour garantir l’efficacité des techniques de manipulation mentale, il faut que les groupes cibles ne soient pas démunis ni socialement ni culturellement. Ils faut qu’ils soient formés d’une jeunesse munie d’une culture moyenne et appartenant aux classes moyennes et supérieures. Trois événements politiques majeurs illustrent l’importance de le jeunesse et de son niveau culturel au dessus de la moyenne dans la mise en oeuvre des techniques de manipulation mentale des masses Ce sont les techniques utilisées par la CIA, en Serbie en 2000, en Georgie en 2003 et en Ukraine en 2004. Des spécialistes comme Thierry Meyssan, John Laugland et Tamila Yabrokova ont étudié les différents stratagèmes mis en œuvre par la CIA pour renverser pacifiquement les régimes politiques en Serbie, en Georgie et en Ukraine. Ils ont mis en évidence les techniques similaires utilisées pour la manipulation des masses dans ces trois pays. D’abord ceux qui ont conduit les manifestations des rues étaient des étudiants utilisant les mêmes devises et les mêmes insignes. En Serbie, la contestation contre Slobodan Milosevic fut menée par un mouvement étudiant appelé Otpor(opposition), lié à l’Institut Albert Einstein, une organisation financée par la CIA et animée par le philosophe Gene Sharp qui prônait la désobéissance civile comme une arme politique. Le colonel américain Robert Helvey était le coordinateur au sein de l’Institut Albert Einstein et Paul B. McCarthy, un agent de la CIA, était présent pendant la guerre de Serbie dans un hôtel à Belgrade. McCarthy reconnaît dans une interview au New York Times que le mouvement Otpor avait bien reçu un financement des USA entre 1998 et 2000.
Trois ans plus tard, la même stratégie est mise en œuvre en Géorgie. A Tbilissi, un mouvement semblable à celui d’Otpor se met en marche : le groupe Kmara qui était aussi un mouvement étudiant de Tbilissi utilisant la stratégie de la non-violence pour contester la légitimité de la victoire d’une coalition de partis qui avait remporté les élections du 23 novembre 2003 et qui soutenait le président Edward Chevardnadze. Kmara conduisit au début la « Révolution rose » sous prétexte de fraude électorale, mais contrairement à la stratégie de non-violence proclamée en Serbie, Kmara prit d’assaut le Parlement obligeant le président Chevardnadze à démissionner.
En 2004, revoilà le même scénario qui se rejoue avec le prétexte de la fraude électorale lors des élections de novembre 2004 et la victoire du pro russe, Victor Yanukovich. À l’instar de l’Otpor en Serbie, Kmara en Géorgie, c’est aussi un mouvement étudiant nommé Pora qui prit la tête de la Révolution Orange, mettant ainsi la pression sur la cour Suprême et aidé par la menace de sanction de Powell, pour proclamer la victoire de Yuschenko comme Président de l’Ukraine.
Mas les mêmes manœuvres ont lamentablement échoué lors des élections en Biélorussie qui a déjà compris les stratagèmes mais qui est soumise depuis à des sanctions imposées et par les USA et l’union européenne.
En conclusion, on peut se demander si, avec les propriétés du cerveau humain et du système nerveux tels qu’ils ont été faits, la vie en société aurait été possible. Car il serait insupportable pour un être doué d’une conscience d’accepter de vivre dans une société où ce sont les lois de la domination, de la soumission et de la servitude qui sont le lot quotidien de l’espèce humine.
FAOUZI ELMIR
Mots clés : Techniques, manipulation mentale, propagande
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