Les dangers de la manipulation mentale
Stéphane LAURENS
Prosélytisme (gagner des adeptes, convertir)
ou auto-conversion (conserver ses adeptes
en entretenant leur foi) ?
« On parle d'influence quand une personne ou un groupe agissent de façon secrète sur
une autre personne ou un autre groupe. Il lui est attribué les caractères de l'étrangeté
parce qu'elle fait irruption dans un autre type de communication auquel nous sommes
habitués, celui où l'intentionnalité joue le plus grand rôle. Mais c'est là une erreur
d'optique. L'influence ne cesse pas, puisque nous transmettons et recevons sans
discontinuité les signes de nos impressions et de nos affections, puisque nous
participons activement et passivement à chaque instant au réseau relationnel qui nous
individualise. » (Roustang, 1990, p.75)
Partant de l’idée que des groupes sectaires constituent une menace pour l’ordre public et
qu’ils peuvent exercer une influence néfaste sur les individus, diverses commissions
d’enquête sur les sectes ont été entendues ces dernières années (suite au rapport Vivien
sur les Sectes, deux rapports ont été présentés : un rapport sur les sectes en France et un
sur les sectes et l’argent). Finalement, un article du Code pénal visant un délit de
manipulation mentale a été examiné par l’Assemblée nationale.
La section intitulée « De la manipulation mentale », comprend notamment un article
(Article 225-16-4) qui « définit le champ et la nature de ce nouveau délit, susceptible
d'être réalisé au sein d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour
effet de “créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes
qui participent à ces activités”. La manipulation mentale consiste à “exercer sur l'une
d'entre elles des pressions graves et réitérées ou à utiliser des techniques propres à
altérer son jugement afin de la conduire, contre son gré ou non [comme pour le délit de
bizutage visé à l'article 225-16-1 du code pénal], à un acte ou à une abstention qui lui
est gravement préjudiciable”. » (Rapport présenté à l’Assemblée nationale le 20 juin
2000 ; pour une analyse de la notion de manipulation mentale, cf. Salavastru, 2002)
Si cet article a finalement été rejeté, les débats suscités par une définition de l’influence
des sectes et par la manipulation mentale sont particulièrement riches et diversifiés :
ainsi à côté de la réflexion sur une définition de ce qu’est une secte, sur des dangers
qu’elle représente, sur les moyens qu’elle utilise…, on trouve aussi des analyses sur la
Les dangers de la manipulation mentale
liberté religieuse, sur la nature et l’importance de l’influence dans toute démarche
éducative, sur la nature de la conscience, sur les rapports entre influence, socialisation et
aliénation de l’individu… et ce débat implique à la fois des juristes, des religieux, des
politiques, des philosophes, des psychiatres…
Touchant directement une thématique centrale de la psychologie sociale, les relations
d’influence sociale, il me semble opportun d’éclairer par un point de vue assez original
ce débat en ce qui concerne un aspect central : les rapports entre la source et la cible
dans une relation d’influence.
L’influence qui fait peur
L’influence interindividuelle ou l’influence sociale fascine et effraye. Sa riche
iconographie (Films d’archives de leaders charismatiques fascinant les foules ; images
de possédés, de somnambules ou d’hypnotisés obéissant sans réserve à celui qui les
guide…), les terribles faits divers qui lui sont attribués (Suicides collectifs, crimes
rituels…) ainsi que de troublantes études scientifiques (Travaux sur l’hypnose, études
expérimentales sur le conformisme ou soumission à l’autorité…) nous affirment
l’existence d’une force quasiment irrésistible et qui pourrait nous pousser à faire ou à
penser des choses que nous ne voudrions pas, une force qui pourrait même nous
conduire à notre perte.
Il y a, avec l’influence, l’idée d’une intrusion, d’un véritable viol de la conscience, de la
volonté… qui semble pouvoir passer sous le contrôle ou la volonté d’un autre. Ce n’est
plus moi qui veut ou qui agit, c’est la volonté d’un autre qui est entrée en moi et c’est un
autre qui agit à travers moi (sentiment de possession).
Ces sentiments d’emprises, ces délires d’influence toujours très vivaces (cf. Janet, 1929,
1937) se trouvèrent exacerbés dans leurs aspects psychologiques, sociaux, religieux et
légaux lors des phénomènes de possessions qui marquèrent l’Europe du XVIIe siècle et
qui se retrouvent aujourd’hui mis en scènes dans une quantité impressionnante de films
et de séries télévisées. Il en fut de même avec la grande mode du somnambulisme puis
celle de l’hypnose.
La puissance de l’influence : le cas de l’hypnose
La découverte de l’hypnose et de son utilisation dans le cadre d’une relation
thérapeutique, a très vite débordé le milieu médical pour envahir la sphère de la
philosophie, de la sociologie, du droit… C’est ainsi que Tarde (1890) grâce à cette
célèbre formule l’homme social est un hypnotisé en fit le fondement des relations
sociales [1] , que l’école de Nancy soutint que sous hypnose, des crimes pouvaient être
suggérés et réalisés ; que des sociétés savantes voulurent restreindre la pratique de
l’hypnose aux seuls médecins tant les dangers étaient grands de laisser ce si puissant
instrument aux mains de quiconque.
Ainsi, au nom de l’éthique, de la morale et de la science, lors du premier congrès
international de l’hypnotisme de Paris (1889), fut voté une résolution demandant que
seuls les médecins fassent usage du magnétisme ou de l’hypnose (Cf. Méheust, 1999, p.
Les dangers de la manipulation mentale
524-532). Ces instruments puissants devaient être réservés à un bon usage et il
convenait donc de les interdire à ceux qui pourraient en faire un mauvais usage
(magnétiseurs sans formation en médecine, magnétiseurs de spectacle…).
Tout l’argumentaire de cette volonté d’interdire repose sur l’idée que par l’utilisation
d’une technique (ici l’hypnose) on obtient des effets d’influence très puissants et que
pour maîtriser ces effets, il faut maîtriser la source (ici l’hypnotiseur) sa morale, ses
intentions… On en arrive donc à distinguer des catégories sociales par leur formation
(études de médecine par ex.), leur moralité supposée (serment d’Hippocrate par ex.)…
et, sur cette base, à leur donner certaines prérogatives (ici le droit de pratiquer
l’hypnose). Le débat tel qu’il fut récemment porté à l’assemblée nationale à propos du
délit de manipulation mentale reprend exactement cette idée (Pech, Zagury, 2002 ;
Villate, Scholiers, Freixa i Baqué, 2003).
Toute cette logique conduit à supposer que la cible de l’influence (le possédé, le
somnambule, l’hypnotisé, le manipulé…) est un réceptacle passif de l’influence, qu’elle
est totalement soumise et qu’elle ne peut pas opposer de résistances à la source
d’influence. Le fait qu’elle soit, par exemple, plongée dans l’état hypnotique ne dépend
pas d’elle, de son désir, de sa volonté… mais exclusivement du désir et de la volonté de
l’autre associés à une technique qui permet la mise en oeuvre de son désir et de sa
volonté.
Aujourd’hui, cette effervescence autour de l’hypnose a disparu et rien dans le champ
social ne l’a remplacée si bien qu’il peut nous sembler que nous sommes sorti de ces
vielles croyances qui avaient affecté nos ancêtres.
Cependant, cette idée d’un influence puissante, d’un viol des consciences, d’une
orientation extérieure de nos désirs, d’une manipulation de nos décisions… est toujours
bien présente en chacun de nous. La publicité guiderait nos achats, les journalistes
orienteraient nos opinions et nous montreraient une réalité falsifiée que nous finirions
par admettre, les politiques et les religieux nous duperaient… et évidemment, à
l’extrême de très méchants mouvements sectaires infiltreraient leurs mauvaises idées
dans les bons esprits de nos petits enfants. Ce faisant, ils s’empareraient d’eux, grâce à
des techniques de manipulations, de lavage de cerveaux…
Donc, méfions nous de l’influence de l’autre, qui de loin, insidieusement, veut peut-être
s’emparer de nous comme autrefois le diable possédait de pauvres folles.
C’est finalement toujours le même schéma qui revient. D’un côté le diable (le malin), la
secte, le gourou… et de l’autre l’homme naïf, leur proie innocente (celui qui ignore le
mal, qui est pur et sans malice). Les premiers sont narcissiques, ils veulent satisfaire
leurs désirs et volontairement utilisent les moyens nécessaires à cette satisfaction. De
l’autre l’homme naïf, le quidam insouciant, se promène dans la vie comme le Petit
Chaperon rouge dans le bois.
Évidemment, le problème étant ainsi posé, chacun prendra la mesure du risque que
court le second (l’innocent sans malice) de tomber dans les griffes du premier (le
malicieux, le malin). Il est une proie facile dès qu’il devient un élément du désir de
Les dangers de la manipulation mentale
l’autre, dès que cet autre malicieux jette son dévolu sur lui.
Ce schéma, à la fois simple et fabuleux, a pour qualité de constituer une trame
commune, un schéma global commun à la fois à la fable du Petit Chaperon rouge et aux
histoires de possessions ; il se retrouve hélas aujourd’hui pris au sérieux notamment en
ce qui concerne l’influence des sectes comme il le fut autrefois avec les phénomènes de
possession et d’hypnose.
Comment se protéger de l’influence ?
Si l’on admet ce schéma, il devient aujourd’hui nécessaire de démasquer ces
dangereuses sources d’influence (les diables ou les malins modernes) et de trouver des
moyens de s’en protéger. Comme le soutiennent Pech et Zagury (2002), il va donc
falloir distinguer les influences légitimes des obscurs trafics d’influence, il va falloir
trier les bonnes et les mauvaises sources d’influence, pour autoriser les bonnes et
interdire les mauvaises.
Cette démarche est non seulement délicate mais elle est aussi particulièrement
dangereuse, et sans doute beaucoup plus que le danger qu’elle se propose de combattre.
Demandons nous donc, comment, autrefois des protections sociales ont été élaborées
contre la si redoutable hypnose ; retrouvons les procédés qui ont permis à nos ancêtres
de lutter contre cette technique surpuissante afin de ne pas être réduits aujourd’hui à
l’état de marionnettes agitées entre les mains des hypnotiseurs modernes malveillants.
Quelle déception !
Il n’y a rien pour se protéger, aucun préservatif moral à l’influence de l’autre.
Mais alors comment avons-nous pu nous sortir de ces griffes si puissantes ?
La réponse est simple et elle a déjà été donnée par Malebranche au XVIIe siècle à
propos des phénomènes de possession et de sorcellerie : il n’y a de griffes que pour
ceux qui les craignent ou les imaginent, pas pour les autres : « dans les lieux où l’on
brûle les sorciers, on en trouve un grand nombre, parce que, dans les lieux où on les
condamne au feu, on croit véritablement qu’ils le sont, et cette croyance se fortifie par
les discours qu’on en tient. Que l’on cesse de les punir et qu’on les traite comme des
fous ; et l’on verra qu’avec le temps ils ne seront plus sorciers (…) en punissant
indifféremment tous ces criminels, la persuasion commune se fortifie, les sorciers par
imagination se multiplient (…). C’est donc avec raison que plusieurs parlements ne
punissent point les sorciers ; il s’en trouve beaucoup moins dans les terres de leur
ressort ». (Malebranche, 1674, Livre deuxième, Chapitre dernier, p. 207-208).
Pour l’hypnose – cette technique si puissante utilisée par Broca pour des opérations
chirurgicales sans anesthésie, utilisée par Janet et Bernheim pour enlever des
paralysies…, cet instrument irrésistible – il en est comme de la possession, elle est avant
tout la réponse d’un individu à la demande d’un autre et, dans cette réponse et cette
demande, ce qui est déterminant, c’est la volonté, l’acceptation, le désir… à la fois de
l’hypnotiseur et de l’hypnotisé.
Les dangers de la manipulation mentale
De ce point de vue, le parcours de Bernheim est exemplaire : avec l’école de Nancy et
comme beaucoup d’autres, il soutint que tout homme était hypnotisable et que
l’hypnose était un état particulier pendant lequel les suggestions devenaient toutes
puissantes, irrésistibles (Bernheim, 1884). À l’inverse, vingt ans plus tard, il considérait
que l’hypnose n’était pas un état favorisant les suggestions, mais qu’au contraire, la
suggestion, ce phénomène qu’il considérait comme naturel et normal dans la vie sociale,
pouvait produire l’état hypnotique avec ses diverses caractéristiques : « il n’y a pas
d’hypnotisme, il n’y a que de la suggestion ; c’est-à-dire, il n’y a pas un état spécial,
artificiel, anormal ou hystérique qu’on peut qualifier d’hypnose ; il n’y a que des
phénomènes de suggestion exaltée qu’on peut produire dans le sommeil, naturel ou
provoqué. (…) celui-ci [l’hypnotisme] lui-même est un phénomène de suggestion qui
peut aboutir ou non comme les autres actes suggérés, mais il n’est pas nécessaire pour
obtenir les autres phénomènes. » (Bernheim, 1911, p. 16).
Ainsi, l’étrange, fascinante et surpuissante hypnose se ramenait à un simple artefact
d’un phénomène normal, naturel, nécessaire. La bulle se dégonflait. L’exceptionnel était
le quotidien.
Voyons si nos dragons d’aujourd’hui (manipulation mentale, lavage de cerveaux…)
sont si différents de ces monstres maintenant désuets et presque oubliés.
La solution préconisée par Malebranche consiste à se moquer de ceux qui croient à cette
puissante invasion et la voient partout.
Contentons nous pour l’instant d’argumenter, tentons de rétablir aujourd’hui en
psychologie sociale le chemin autrefois emprunté par Bernheim et Delboeuf [2] .
Les ratés du prosélytisme
Ces formes extrêmes et caricaturales de l’influence ont laissé place à des formes
d’influence, plus discrètes, plus simples qui sont admises, parfois enseignées et
régulièrement utilisées dans la vente, le management, la séduction… (Joule, Beauvois,
1998).
Derrière ces nouvelles formes édulcorées de l’influence on retrouve toujours le même
schéma et les mêmes désirs : le désir de se rendre maître de l’autre par sa propre
influence tout en se protégeant de son influence. Le sous-titre du livre Influence de
Robert Cialdini (1987) illustre parfaitement cette ambition : Soyez celui qui persuade.
Ne soyez pas celui qu’on manipule.
Ainsi, ce qu’on fit autrefois avec l’hypnose ou la soumission à l’autorité se fait
aujourd’hui avec les phénomènes d’engagement ou de dissonance : à l’instar de
Cialdini, des spécialistes tentent de « monter en épingle » de petits phénomènes
expérimentaux pour en faire l’alpha et l’oméga des relations sociales.
Cette extrapolation de résultats expérimentaux est pratique courante, elle permet de
montrer la portée des recherches réalisées et de leur trouver des champs d’applications.
Hélas, dans le cas présent, il existe aussi un danger très important : celui de donner une
caution scientifique à ceux qui croient à la possibilité d’une puissante influence des
Les dangers de la manipulation mentale
sectes ou à ceux qui veulent agir contre ces influences menaçantes (édicter des lois,
interdire des associations…).
En effet, si des travaux scientifiques soutiennent l’idée que par l’utilisation de quelques
techniques psychologiques, on peut, à volonté, orienter les attitudes d’un individu, il est
logique de penser que, grâce à ces techniques, des groupes mal intentionnés pourraient
avoir une influence [3] . Comme le dénonce régulièrement la presse, dans les cas les
plus graves ils pourraient pousser les individus à abandonner leur famille, à donner leurs
biens à la secte, à commettre des crimes qui leur sont commandés (donner une
éducation dévoyée à leurs enfants ; s’adonner à des pratiques sexuelles déviantes…), se
laisser mourir faute de soins ou même à se suicider.
On le voit, les effets ne sont pas ténus !
Comment tout cela est-il possible ? Quel danger courrons-nous ?
Les mécanismes de la dissonance cognitive dans une secte
L’une des recherches sur les phénomènes sectaires les plus connue en psychologie
sociale est la fameuse étude réalisée par Festinger, Riecken et Schachter (1956) à
propos d’un groupe apocalyptique et prophétique réuni autour de Mrs Kee.
Mrs Kee avait annoncé la fin du monde et un groupe de croyants se préparait, avec elle,
à cet évènement. Évidemment, la fin du monde ne vint pas à l’heure dite. Une des
principales prédictions de Mrs Kee fut donc démentie par les faits et chaque croyant fut
témoin de cet échec évident.
Or, Festinger et coll. (1956) observèrent que les croyants réunis autour de Mrs Kee ne
quittèrent pas la secte après cette fausse prédiction de leur gourou. Bien au contraire,
leur croyance fut renforcée. Ces individus furent plus soudés, plus radicaux et plus
engagés dans leur croyance commune qu’ils ne l’étaient avant l’échec de la prophétie.
Nombre d’expériences sur la dissonance montrent ces effets. Mais de quels effets
s’agit-il au juste ? Peut-on expliquer par là qu’une secte puisse recruter de nouveaux
membres ?
Cette analyse de terrain conduite par Festinger et coll. (1956) ne montre pas l’efficacité
de la dissonance dans une démarche de prosélytisme. Au contraire, au fur et à mesure
que le groupe sectaire se trouve engagé dans sa voie originale, il se coupe des autres, il
s’éloigne du reste du monde.
Schématiquement, l’étude de Festinger et coll. (1956) montre la création d’un
groupuscule isolé dont les membres se révèlent être de plus en plus engagés, de plus en
plus proches les uns des autres, mais de moins en moins nombreux et de plus en plus
loin des autres. Dans ce cas, la dissonance montre donc la déviation de plus en plus
grande de quelques individus de moins en moins nombreux au fil du temps.
Notons aussi que tout cela fonctionne si et seulement s’il y a d’abord une acceptation. Il
faut au préalable que l’individu ait rejoint Mrs Kee pour prier avec elle en attendant la
fin du monde. Si cette première condition est remplie, alors les mauvaises prophéties de
Les dangers de la manipulation mentale
Mrs Kee pourront éventuellement affermir les convictions de ces individus déjà
convaincus. Mais, hélas pour le prosélytisme, chaque nouvelle mauvaise prophétie
rendra cette secte plus ridicule et plus isolée pour l’ensemble du reste de la société,
c’est-à-dire pour tous ceux qui ne sont pas convaincus avant la mauvaise prophétie.
C’est donc un double effet qu’on observe : les prophéties erronées rendent de plus en
plus convaincus ceux qui le sont déjà, mais elles rendent encore plus sceptiques ceux
qui ne le sont pas.
Les faits tels que ceux rapportés par Festinger et coll. (1956) sont en définitive assez
courants en ce qui concerne la vie des sectes. Par exemple, pour les élections
législatives Japonaises de février 1990, le gourou de la secte Aum avait prédit sa
victoire électorale. Évidemment, il échoua comme tous les autres membres de cette
secte s’étant présentés. Cet échec eut comme première conséquence de faire baisser le
nombre de nouvelles recrues (Courrier international N°523, du 9 novembre 2000, p.
55). Par contre, on peut supposer que, comme dans le cas étudié par Festinger et coll.
(1956), les adeptes déjà engagés dans la secte ont vu leur ferveur augmentée.
Or, peu de temps après cet échec, le gourou fit une nouvelle prophétie : une comète
allait entrer en collision avec la terre et le Japon serait totalement détruit. Il rassembla
ses fidèles sur une île devant échapper au désastre et organisa des séminaires sur ses
prophéties. Avec cette succession de prophéties erronées, on voit assez clairement la
logique prise par la secte : elle se coupe de ceux qui n’en font pas partie, perd sans
doute quelques-uns de ses membres, mais radicalise ceux qui lui restent fidèles. C’est
une logique de différenciation par rapport à autrui et de repli-renfermement sur soi,
c’est la clôture, la fermeture conduisant à une extrémisation et une radicalisation du
groupe.
Il y a deux aspects intéressants : d’une part les fidèles engagés sont de plus en plus
engagés, de plus en plus pris dans cet univers clos, mais d’autre part, il y a de moins en
moins de fidèles. Ce processus, bien qu’éblouissant, marque en fait la fin de l’insertion
sociale de la secte et donc la fin de son influence sur les individus qui n’appartiennent
pas à cette secte. La logique de la dissonance ne conduit dans ce cas qu’à la survie
momentanée d’un groupuscule se désolidarisant du reste de la société.
L’utilisation des techniques d’engagement
Pourtant, ce qui est sans doute le plus craint des sectes, c’est leur prosélytisme potentiel,
le risque qu’elles recrutent de nouveaux adeptes. Comme on le voit, ce n’est pas avec le
mécanisme de la dissonance cognitive tel qu’il a été appréhendé par Festinger et coll.
(1956) que cela est possible.
Il existe cependant d’autres techniques que les membres des sectes utilisent (ou peuvent
utiliser) sur des individus extérieurs à leur communauté. Ce faisant, orientant une
action, une technique vers l’extérieur, on peut alors effectivement craindre leur
prosélytisme.
Lorsque les premiers groupes de disciples de Krishna firent des quêtes dans les rues de
villes américaines, ils n’obtinrent que très peu de dons. Leurs crânes rasés, leurs longues
Les dangers de la manipulation mentale
robes, leurs étranges danses… suscitaient la méfiance et les gens les évitaient. C’est
alors qu’ils eurent recours aux techniques d’engagement : les disciples de Krishna,
plutôt que de solliciter un don, commencèrent à donner eux-même quelque chose aux
gens qu’ils croisaient (un livre, une fleur…), leur affirmant qu’il s’agissait là d’un
cadeau. Ce faisant, ils plaçaient volontairement le sujet dans une position de débiteur, ce
qui l’obligeait (pour des raisons de réciprocités des échanges) à rendre quelque chose en
échange du cadeau (Cialdini, 1987, p. 29-30).
Ces petites techniques d’engagement grâce auxquelles un individu peut être manipulé
ont souvent été décrites en psychologie sociale comme très efficaces (Cialdini, 1987). Il
y a tout d’abord une sorte d’amorçage pour créer artificiellement une relation à l’autre
(par exemple, lui donner une fleur, un livre… ; lui demander un renseignement… ;
exiger de lui quelque chose de considérable…). Ensuite, sur la base de ce début de
relation, le manipulateur oriente la réponse du sujet tout en laissant toujours à ce dernier
l’impression qu’il agit en totale liberté : si le manipulateur lui a donné un livre, il peut
proposer en contrepartie du livre donné que le sujet fasse un don (contre don dans ce
cas) ; si le manipulateur lui a demandé quelque chose de considérable, il peut ensuite
diminuer ses exigences, donnant l’impression de faire un pas, de faire des concessions.
Ceci peut amener le sujet à faire de même et à accepter lui aussi de faire un pas en
acceptant une demande plus faible.
Globalement, ces techniques sont basées sur la réciprocité (Cialdini, 1987) et on y
retrouve les logiques de l’échange ou du don analysées autrefois par Mauss (1923).
Notons ici que pour Mauss (1923, p. 199), le don n’est pas un artefact, mais une
condition nécessaire du fonctionnement social. D’une part, les échangent lient plus ou
moins durablement des clans, des tribus ou des familles : plutôt que de s'entre déchirer,
de se décimer les uns les autres, ils échangent, se lient entre eux. D’autre part, le don a
une fonction économique : il permet le crédit, il est beaucoup plus élaboré que le troc
qui nécessite l'échange immédiat et simultané de biens. Le don permet de mettre du
temps entre le moment où l'on donne et celui ou l'on rend. Dans certains cas, ce temps
est une condition de survie des groupes. C’est ce que décrit bien la fiction de
Montesquieu à propos de méchants Troglodytes qui refusant, le don et l’échange, ne
peuvent survivre (Montesquieu, Lettres persanes, Lettre XI. Usbek à Mirza, à Ispahan).
Mais, admettons que ce qui est normal et nécessaire chez le primitif puisse être perverti
et avoir de graves conséquences aujourd’hui. Quel est le danger ? Le danger véritable ne
vient pas de l’utilisation isolée d’une de ces techniques. D’ailleurs dans les exemples
donnés par Cialdini (1987), l’utilisation de celles-ci a pour fonction non de recruter de
nouveaux membres mais de récolter des dons pour la secte.
Le danger viendrait d’une utilisation en chaîne de ces techniques. Chaque acte
d’engagement produirait ses petits effets, mais, comme on le sait, c’est en ajoutant de
modestes petites pierres les unes aux autres qu’on peut bâtir des cathédrales. C’est ainsi
qu’est sans doute née l’idée d’une cascade d’engagements : des individus acceptant
d’abord une toute petite chose, puis une moyenne, puis une un peu plus grande…
jusqu’à tout accepter.
Les dangers de la manipulation mentale
La technique est simple, le manipulateur demande de plus en plus, et, plus l’individu a
accordé, plus il sera prêt à donner pour se montrer congruent avec ce qu’il a déjà
accordé. C’est apparemment imparable !
Voyons sur le long terme ce qu’il se passe en réalité. Barker (1983) a étudié l’efficacité
des techniques utilisées par les moonistes sur le long terme.
Des membres de la secte demandent tout d’abord à des individus pris au hasard des
rencontres, s’ils accepteraient de visiter leur site.
Aux individus qui acceptent (1er acte engageant), et qui viennent le visiter (2ième acte
engageant), les membres de la secte proposent ensuite de participer à un séminaire de
deux jours. Ceux qui viennent (3ième acte engageant) à ce séminaire se voient proposer
un nouveau séminaire d’une semaine (4ième acte engageant)… puis un séminaire de 21
jours (nième acte engageant), puis une demande d’adhésion à la secte (le but de la série
d’actes engageants !).
Ce schéma est bien celui de la cascade d’engagements, les engagements sont de plus en
plus grands et, à la fin, il y a l’adhésion.
Voici les résultats concernant l’efficacité de cette cascade d’engagements :
100%
85%
30%
25%
18%
15%
13%
10%
7%
5%
4%
Quatre personnes sur 100 qui ont accepté de visiter le site et qui se sont présentées à
cette visite sont encore présentes 4 ans plus tard. Ça n’est donc pas très efficace.
Mais ce chiffre est encore bien trop important. Il faut en effet se demander avec
combien d’individus les membres de la secte ont dû discuter pour que 1017 personnes
finissent par venir visiter le site. Peut-être 10.000 ?
À la lumière de ces chiffres on peut se demander à quoi rime l’utilisation de cette
technique. En effet, si le bénéfice en termes de recrutement est infime, la masse de
travail demandé aux membres de la secte est considérable : contacter des milliers
d’individus, discuter avec chacun d’eux, leur demander de visiter un site, de participer à
Les dangers de la manipulation mentale
des séminaires, de devenir adhérent, d’organiser ces séminaires…
Il est évidemment difficile de calculer un rapport coût/bénéfice, mais si le seul bénéfice
tient dans le recrutement de nouveaux membres, il est dérisoire.
Par contre, si on regarde l’utilisation de cette technique sous l’angle de la dissonance
telle que l’ont analysée Festinger et coll. (1956), on trouve une autre réponse : par ce
lourd travail, les membres de la secte seraient de plus en plus convaincus et de plus en
plus engagés dans leur croyance. Ils le seraient même de plus en plus à chaque fois
qu’ils échoueraient à convaincre un individu (Beauvois, Ghiglione et Joulé, 1976).
Ainsi, les ratés de la cascade d’engagements pour recruter de nouveaux membres
permettraient aux membres déjà convaincus de rester, de s’accrocher à leur secte et à
leur croyance.
La fameuse expérience sur la dissonance réalisée par Festinger et Carlsmith (1959) ou
celles réalisées par Nuttin (1972) sur le rôle playing, ne montrent pas autre chose : un
individu payé pour soutenir une position opposée à la sienne afin de convaincre un autre
individu a, après cet exercice, changé d’opinion en se rapprochant de l’opinion qu’on lui
a demandé de soutenir (cf. aussi Janis, Mann, 1965 et Mann, Janis, 1968).
Il y a finalement une morale à ces histoires de manipulateurs et de manipulés. Elle est
bien connue : tel est pris qui croyait prendre. Ou, pour adapter cette maxime à notre
cas : ceux qui veulent convaincre les autres finissent par se convaincre eux-mêmes.
L’auto-conversion
L’influence : un processus symétrique
Fondamentalement ces techniques d’engagements reposent sur une série d’asymétries
relatives à la situation, aux acteurs, aux intentions, aux décisions… (Cialdini, 1987, p.
35).
Dans le cas de la technique d’engagement utilisée par les disciples de Krishna, c’est le
disciple et lui seul qui a une intention, un objectif, c’est lui seul qui décide d’aborder
telle personne, c’est lui seul qui décide de lui donner quelque chose, c’est lui seul qui
propose ce que la personne peut rendre en échange…
En fait, ici l’interaction sociale se déroule dans un cadre donné à l’avance et suivant un
scénario préparé par le manipulateur. Les individus manipulateurs y sont décrits comme
l’est J.R. Ewing dans la fameuse série Dallas : sa vie ressemble à un jeu d’échec où tout
est calculé, sa psychologie est une rationalité calculatrice où la réalisation des intérêts
personnels constitue la seule motivation.
On est là dans une situation où, comme le décrit Moscovici à propos des modèles
fonctionnalistes de l’influence, les systèmes sociaux et le milieu, sont « des données
prédéterminées pour l'individu ou le groupe. Ils fournissent à chacun, avant
l'interaction sociale, un rôle, un statut et des ressources psychologiques. » (Moscovici,
1979, p. 12).
Ces rôles et ces statuts sont, dans la situation d’application d’une technique
Les dangers de la manipulation mentale
d’engagement, clairement distribués avant l’interaction. Ils opposent une source et une
cible, la cible étant le réceptacle passif de l’influence de la source qui, elle, maîtrise
tout.
Ce schéma des rapports sociaux et de l’homme qui est mis en oeuvre dans les techniques
d’engagement pose problème quant à sa validité, quant à sa qualité à rendre compte de
la réalité quotidienne des rapports sociaux : s’agit-il là d’un cas particulier, anormal,
étrange, extraordinaire du fonctionnement social ou s’agit-il d’un cas normal, courant,
fondamental des rapports sociaux ?
Une simple extrapolation de ce rapport social asymétrique et dualiste de l’homme (d’un
côté les manipulateurs, ceux qui ont une intention, des objectifs, une volonté… et de
l’autre les manipulés, des hommes passifs sans volonté propre, “téléguidés” par leur
manipulateur) aboutit inévitablement à la description d’une société tyrannique
(Roustang, 1990, p. 152-153) comme l’est la horde primitive décrite par Freud (1921).
Les sociétés tyranniques existent et les groupes sectaires en constituent souvent des
exemples frappants. Donc, ce schéma des rapports sociaux asymétriques a bien un cadre
de validité (un cadre durable puisque certaines sociétés de cette forme sont parfois
particulièrement résistantes), mais hors de ce cadre, il ne décrit que des situations
exceptionnelles et éphémères. Les sociétés démocratiques, ouvertes ne sont pas fondées
sur un tel schéma. C’est ainsi que Moscovici (1979), s’opposant au modèle
fonctionnaliste de l’influence, proposera un modèle, le modèle génétique, dans lequel la
relation d’influence est fondamentalement symétrique.
En définitive, le noeud du problème théorique qui nous occupe se trouve dans
l’interaction lors de la situation d’influence. Que se passe-t-il à ce moment-là du point
de vue de l’influence ? Y a-t-il autre chose que l’application de la volonté de la source,
qu’une influence de la source sur la cible ?
En effet, si lors de la situation d’influence les effets ne se trouvent que sur la cible, le
rapport d’influence est donc fondamentalement asymétrique. Si, au contraire on
retrouve des effets sur la source, le rapport d’influence est fondamentalement
symétrique.
Le mystificateur mystifié ou le compère influencé
C’est en montrant qu’une source peut être influencée par une cible ou être influencée
par elle-même lorsqu’elle tente d’influencer une cible que la modèle génétique de
l’influence trouverait son meilleur argument contre le modèle fonctionnaliste. En effet,
pour réfuter le modèle fonctionnaliste, le modèle génétique s’est jusque-là appuyé sur
une série d’expériences et sur des analyses de faits historiques ou sociologiques
montrant qu’une minorité pouvait avoir une influence. Cependant, ce modèle postule
aussi que l’influence est quelque chose de symétrique et il rejette le dualisme
source/cible. Pourtant, dans les expériences réalisées jusque-là, rien ne vient prouver ces
importantes hypothèses.
D’un point de vue expérimental, peu d’études se sont intéressées à ce phénomène de la
source influencée ou du manipulateur manipulé.
Les dangers de la manipulation mentale
Souvent dans les études expérimentales sur l’influence sociale, un compère est utilisé
par l’expérimentateur. À la demande de l’expérimentateur, le compère doit affirmer
telle position, doit donner telle réponse, doit adopter telle attitude… Et dans ce cas, ce
qui est le plus souvent étudié, ce sont les effets que ce compère produit sur les sujets
naïfs auxquels il est confronté. Il est considéré comme la source d’influence (l’émetteur)
et le sujet naïf est la cible d’influence (le récepteur).
Pourtant, lorsqu’on interroge ces compères, on est parfois surpris. Le cas le plus
étonnant est sans doute celui de ces compères qui devant donner une réponse fausse à la
demande de l’expérimentateur afin d’influencer un sujet naïf, ont fini par être influencé
par cette réponse dont ils savaient pourtant qu’elle était fausse. [4]
Ces compères étaient en général payés pour, des journées durant, répondre « vert »
quand l’expérimentateur affichait sur un écran une diapositive objectivement bleue. Ils
avaient pour mission d’influencer des sujets naïfs placés à leur côté le temps d’une
expérience. Ces compères savaient que la diapositive projetée était bleue et, en outre, ils
connaissaient bien ces expériences sur l’influence des minorités puisqu’ils étaient
recrutés parmi les étudiants en DEA ou en thèse à l’EHESS où ils baignaient avec
d’autres qui faisaient leur thèse de doctorat sur ces phénomènes.
Or, ce que nous apprennent ces compères, c’est qu’au bout d’un moment, ils finissaient
par voir la diapositive de la couleur dont ils étaient chargés de la désigner aux sujets
naïfs : au début ils la voyait bleue, mais ensuite, ils finissaient par la voir verte !
Une récente étude expérimentale reprenant ce paradigme et s’attachant à mesurer les
changements perceptifs chez les compères montre en effet qu’ils sont bien influencés
par la position qu’ils tentent de diffuser (Laurens et Moscovici, 2004).
On prend ici la mesure de la puissance de ce mécanisme d’auto-conversion puisque ici
les changements se produisent dans le domaine du perceptif et pas seulement des
opinions et qu’en plus il affecte des sujets qui savent avec certitude que la diapositive
est bleu et non verte.
De tels effets d’influence et d’auto-influence obligent donc à rejeter le modèle des
relations sociales dualistes et asymétriques proposé par les tenants de la manipulation
mentale.
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Les dangers de la manipulation mentale
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[1] L’expression utilisée par Tarde est qu’il faut regarder « l’homme social comme un
véritable somnambule ». Mais dans les rééditions de son livre les lois de l’imitation,
Tarde ajoutera cette note à propos du somnambulisme. « Cette expression démodée
montre qu’au moment où j’ai pour la première fois publié ce passage, le mot
hypnotisme ne s’était pas encore substitué à celui de somnambulisme. » (Tarde, 1890,
note 3, p. 82)
[2] Ainsi, au moment de l’apogée de l’hypnose, quelques philosophes comme Joseph
Delboeuf, rejetaient cette conception asymétrique du rapport hypnotique et s’opposaient
donc à cette volonté d’appropriation par certains de la pratique de l’hypnose. Le point
de départ de la critique de Delboeuf est le suivant : la puissance du rapport hypnotique
n’est pas dans l’hypnotiseur, mais dans l’hypnotisé. En inversant les déterminants de
l’explication du rapport hypnotique, Delboeuf montre d’un côté la complexité d’un
phénomène qui ne se laisse pas facilement réduire et montre en même temps que
l’explication dominante qui pousse à l’interdiction de l’utilisation de l’hypnose par les
non-médecins n’a d’autres bases qu’une idéologie relative à la notion l’influence. Le
dualisme hypnotiseur/hypnotisé, ce modèle du rapport social se retrouve dans la volonté
de certains de réserver l’utilisation de l’hypnose aux seuls médecins affirmant ainsi de
nouvelles dualités : savant/profane, moral/amoral… (cf le débat entre Delboeuf 1889 et
Ladame 1889 ainsi que l’analyse de Duyckærts, 1992, à propos de la position de
Delboeuf). Sur la base de cette conception du rapport hypnotique, on arrive, par
extrapolation de ce rapport dualiste, à une conception des rapports sociaux et à
l’affirmation d’un mode de gouvernement : la tyrannie.
[3] Or, comme c’est souligné dans le rapport présenté par Mme la députée Catherine
Picard à l’assemblée nationale le 20 juin 2000, le problème est d'autant plus grave que
« les instruments dont disposent les manipulateurs sont aujourd'hui sans commune
mesure avec ceux des décennies passées ». Cette idée est centrale dans l’argumentation
avancée par l’UNADFI (Union nationale des associations de défense des familles et des
individus). Pourtant, à la lecture de cette analyse du phénomène sectaire (cf. Le
Phénomène Sectaire : www.unadfi.org/sectes/manipulation.htm), on doit bien avouer
qu’on ne trouve rien de plus, rien de spécifique, que ce qui est habituellement utilisé
dans les groupes ou les sociétés non sectaires. C’est principalement pour cette raison
que la plupart des groupes religieux se sont opposés à ce projet de loi, le jugeant
liberticide (cf. www.mpe-poc.org/loiantisecte.htm ;
www.cfjd.org/cupboard/analyses/dossier_sectes_1.htm).
[4] Signalons aussi qu’Alaphilippe (1986, 1990) dans une expérience portant sur
l’estimation du nombre de points présents sur une planche montrait aussi que le
Les dangers de la manipulation mentale
compère était influencé par la réponse fausse qu’il tenait de l’expérimentateur et qu’il
devait donner au sujet naïf. D’après Alaphilippe (1990), tout se passe comme si le
compère étant influencé par l’expérimentateur influençait le sujet naïf qui, par ses
réponses influencées par le truchement du compère, venaient en retour influencer le
compère.
Les dangers de la manipulation mentale
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