Publié le 20/07/2013 à 07:45, Mis à jour le 20/07/2013 à 11:55
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Manitas de Plata a besoin de l'aide d'une personne pour les tâches de la vie quotidienne./ Photo Nathalie Stickelbaut
Manitas de Plata, 92 ans, l’un des plus populaires guitaristes flamenco du XXe siècle, est aujourd’hui plongé dans le désarroi le plus total. Après avoir gagné des fortunes, le musicien, qui a vendu 93 millions d’albums, est ruiné. Malade et cloué dans un fauteuil roulant, il n’a même pas les moyens de se payer une auxiliaire de vie. Il lance un appel à l’aide.
Depuis son petit logement de 24 m2 de la Grande Motte, dans l’Hérault, le musicien Manitas de Plata a accordé une interview exclusive à La Dépêche.
Vous lancez un appel pour que les gens vous viennent en aide. Mais qu’avez-vous fait de tout l’argent que vous avez gagné ?
Toute ma vie, j’ai vécu au jour le jour. Je ne pensais pas qu’un jour tout s’arrêterait. Aujourd’hui je n’ai plus de contrat et la maladie complique ma vie. Mes droits d’auteur sont bloqués pour régler des arriérés d’impôt et ma famille n’est pas assez aisée pour m’aider, même si mon fils Fernando fait ce qu’il peut avec le peu qu’il gagne. L’argent que j’ai gagné je l’ai dépensé en m’amusant et j’en ai énormément donné autour de moi, à des gitans comme moi qui étaient pauvres. Je faisais vivre plusieurs familles et il m’arrivait souvent de payer un mariage ou un enterrement à des cousins éloignés ou à des gitans que je connaissais à peine. Je ne regrette pas. Si j’avais à nouveau de l’argent, j’en donnerais toujours autant. L’argent s’est fait pour ça. Ce qui est difficile, c’est de voir que quand tout va bien vous avez plein d’amis et que quand vous êtes ruiné quasiment tout le monde vous abandonne.
Vous ne regrettez pas de ne pas avoir investi, placé une partie de vos gains ?
Oui, je le regrette aujourd’hui. Mais, ce n’était pas dans ma culture. Pour nous, les gitans, acheter de la terre ça ne se fait pas. La terre c’est pour les morts. Maintenant, je vois ça différemment.
Picasso et Dali, qui étaient vos amis, vous avaient offert des toiles. Que sont-elles devenues ?
Je ne sais pas. Je ne les ai jamais retrouvées. Peut-être me les a-t-on volées ou les ai-je perdues ? Je trouvais ça beau mais je n’ai jamais considéré l’art comme une valeur marchande. J’aurais sans doute dû.
Cela vous touche que des gens essayent de vous venir en aide ?
Énormément ! Ça montre qu’il y a des gens qui ont du cœur et c’est ça que je veux voir même si ça me gêne un peu d’en être arrivé là. Mais, j’ai vraiment besoin d’une personne pour m’aider dans mes tâches et soins de la vie quotidienne. C’est pourquoi je sollicite leur générosité.
Quelle serait la meilleure chose qui puisse vous arriver aujourd’hui ?
D’avoir des contrats, de remonter sur scène et de faire des disques. Le public me manque énormément (ndlr : il se met à pleurer avant de se ressaisir). Je veux lui dire que je l’aime et que j’attends toujours de le retrouver. La musique c’est ma vie. J’ai fait des triomphes partout dans le monde. À Londres, New York, au Japon… Et tout ça c’est fini. Mon fils Manero, décédé l’an dernier, me manque aussi énormément. Je suis né dans une caravane, à Sète, et parfois je rêve d’en avoir une à nouveau. J’aimerais bien également revoir Johnny Hallyday. Je sais qu’il me comprendrait. J’ai joué pour lui dans son film «d’où viens-tu Johnny».
Pensez-vous que votre âge et votre état de santé vous permettent encore de jouer ?
Oui. Je pourrais faire de courts récitals assis. J’en rêve.
Êtes-vous heureux ?
Oui et non, surtout parce que je ne travaille plus, que je suis malade et que je n’ai plus assez d’argent pour vivre.
Avez-vous un message à adresser à tous ceux qui liront cette interview ?
Je veux leur dire qu’il faut être généreux, se soucier des autres d’autant que les autres c’est aussi nous et que personne ne sait ce qu’il peut arriver dans la vie».
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Une association de soutien
Nathalie, l’ancienne compagne de Manitas, a décidé de créer une association pour lui venir en aide. «Si j’avais plus d’argent j’aurais bien évidemment réglé les choses moi-même, explique la jeune femme. Ce n’est malheureusement pas le cas. Manitas, qui a ému et fait rêver tant de gens avec sa musique, fait partie de notre patrimoine, nous ne pouvons pas le laisser comme ça».
Jacques Martin, avocat et conseiller général de l’Hérault soutien l’initiative de Nathalie : «J’espère que des gens, notamment des artistes, seront sensibles à sa situation. En attendant, j’essaie de voir comment le conseil général pourrait davantage l’aider». Stéphan Rossignol, le maire de la Grande-Motte, commune où vit Manitas de Plata, assure, quant à lui, «réfléchir à ce que pourrait faire la municipalité».
Pour contacter l’association : contact@manitas-de-plata.fr
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